Bravos d’or: according to what criteria should a work be rewarded?

Bravos d’or: according to what criteria should a work be rewarded?
Bravos d’or: according to what criteria should a work be rewarded?

Lors des Bravos d’or sur 2 ce 1er janvier 2025, le succès des livres, films, séries plébiscités par le public va être présentés comme “incontestable” du fait de leur réussite auprès du public, mesurée en termes d’audience, d’écoutes, de ventes. Pour faire le distingo, notre invitée est Chloé Delaporte, professeure en cinéma à l’Université Paul Valéry . Elle étudie notamment les processus de distinction et de valorisation des œuvres et des artistes au sein du champ cinématographique, et est auteur de La culture de la récompense. Compétitions, festivals et prix cinématographiques (éd. Presses Universitaires de , 2022).

Mais alors, de quel succès parle-t-on là ? “Ceux qui défendent ce type de vote vont parler de succès populaire. Ceux qui critiquent ce type de vote vont parler de succès de l’économie de marché“, commence de répondre Chloé Delaporte. Elle rappelle qu’utiliser les chiffres de vente comme critère de réussite est une tendance récente, après l’introduction des jurys populaires dans les années 1970, qui doivent désigner les artistes les plus méritants.

Est-ce le seul moyen ou le meilleur moyen de distinguer des œuvres ou des produits culturels ? Pensons à d’autres œuvres potentiellement restées discrètes, qui partaient par exemple avec un déficit de publicité, ou qui n’ont pas pu trouver leur public. “Je ne crois pas que ce soit le but d’une telle émission. L’émission n’a pas pour but de récompenser des films, des émissions de radio ou des disques. L’émission a pour but de faire de l’audience. Le meilleur moyen pour les producteurs et productrices, en l’occurrence producteurs de l’émission, de faire de l’audience ce soir, c’est de parler des œuvres qui ont touché un maximum de leurs téléspectateurs et téléspectatrices. Ca peut poser un problème si on parle de la valeur artistique ou de ce qu’on considère être un bon film, une bonne émission, un bon disque.”

Il est intéressant toutefois de s’interroger sur la confusion autour du terme de “populaire”. “On a tendance à polariser les champs artistiques comme s’il y avait d’un côté ce qui serait le succès des élites, de l’intelligentsia, le succès de la critique, d’un grand public éclairé, et de l’autre, le succès des masses.” Une polarisation qui selon la chercheuse ne tient pas complètement : “elle s’effondre assez vite, elle est assez classiste, elle est discutable en plein d’endroits, en termes économiques et esthétiques.” Il y a également une incompréhension sur la notion de succès. “Est-ce que faire 11 millions d’entrées suffit à qualifier le succès ?” Encore faut-il interroger les spectateurs et spectatrices à l’issue de la séance, de l’émission, du podcast ou du disque”.

Au final, y’a-t-il une meilleure manière, selon Chloé Delaporte, de récompenser, de montrer quel a été le succès d’une oeuvre ?  “Si on me demande mon avis à titre très personnel, je ne suis pas persuadée qu’il faille récompenser. Je pense qu’à partir du moment où on crée une logique de concours, de compétition entre les artistes et les œuvres, ça aboutit inévitablement à une invisibilisation d’autres et vraisemblablement à une invisibilisation d’œuvres qui sont déjà assez peu visibles. Je pense qu’il faut faire confiance aux critiques, aux analystes, aux journalistes culturels pour aller mettre en visibilité ce qui mérite de l’être.
Dans tous les cas, ce que la professeure en cinéma note, c’est que ce “dispositif récompensatoire place la personne qui récompense dans une position de philanthrope. Donc forcément, ça invisibilise les intérêts qu’il ou elle a à remettre un prix. Donc j’ai envie de dire que tout prix, toute cérémonie cache quelque chose.

-

-

PREV United States: A Tesla Cybertruck explodes in front of a Trump hotel, killing one
NEXT By Hearsay – The Northwest Passage, by Aline Pénitot