C’est vertigineux… Le Premier ministre a convié tous ses ministres, le 16 décembre, pour un séminaire “plan d’action” jusqu’en… 2027 ! Il sera peut-être rentré en Savoie d’ici là. Michel Barnier voulait donner un horizon ? Les Français n’auront vu que le mur du budget.
Jamais il n’a menti sur la précarité de son bail, conditionné au fait qu’il n’y ait pas de censure croisée de la gauche et du RN. Combien de fois a-t-il répété qu’il n’avait “pas de baguette magique” ? Sans être magicien, il aurait pu “manager”, piloter, autrement.
Que voulez-vous dire ?
On peut lister au moins 3 faiblesses.
Fin septembre, première erreur, quand il téléphone à Marine Le Pen pour dire qu’il a recadré son ministre de l’économie : Antoine Armand refusait de recevoir le RN à Bercy, extérieur, selon lui, à « l’arc républicain ». Marine Le Pen boit du petit lait. Elle s’imagine qu’elle sera traitée en conséquence.
Mais – 2ème erreur -, Michel Barnier l’a fait lanterner 2 mois avant de la recevoir. Et même si 2 cadres du RN, entre-temps, ont vu les équipes de Matignon, le fait que cette rencontre au sommet arrive si tard n’arrange rien. Le RN veut toute sa place dans cette grande “foire” budgétaire !
Troisième erreur ?
Justement d’avoir laissé cette “foire” s’installer. Michel Barnier voulait économiser les 49.3, par contraste avec Elisabeth Borne, par respect du Parlement… Mais à partir du moment où tout le monde sait d’avance que tout finira au 49.3, la courbe des dépenses monte jusqu’au ciel ! Déresponsabilisation générale.
Dans une réunion avec les chefs du socle commun, début novembre, Michel Barnier se plaint de l’absentéisme de ses troupes. Et pour remobiliser tout le monde, c’est là qu’il négocie un “trophée” par groupe ! Les retraites pour Laurent Wauquiez, puis les cotisations patronales pour Gabriel Attal.
La cohésion laisse à désirer. Michel Barnier se prend de plein fouet les leçons du ministre, Antoine Armand (encore lui !), sur le “trop d’impôt tue l’impôt”. Le RN considère qu’il peut, lui aussi, faire craquer Michel Barnier.
Pouvait-il ne pas craquer, vu l’attitude de Marine Le Pen ?
Il y a eu un “endormissement” général… A force d’ânonner que le RN se normalise, tout le monde a fini par oublier ses fondamentaux anti-système !
Il y aura une thèse à écrire, de psycho-politique (matière à inventer !), sur l’avant et l’après 13 novembre, jour des réquisitions dans le procès des assistants parlementaires. Le risque d’inéligibilité immédiate de Marine Le Pen. A-t-elle déjà fait une croix sur ses chances de concourir à la présidentielle ? Perdue pour perdue, je renverse la table ? Avant que Michel Barnier ne puisse marquer des points sur l’immigration, la proportionnelle ?
Donc, pour répondre à votre question : Michel Barnier a négligé le pilotage du socle commun. Il s’est plus inquiété des ambitions de Gabriel Attal, que du chantage à 4 ou 5 milliards d’euros du RN ! A sa décharge, il faut être deux pour danser le tango. Et Marine Le Pen n’a cessé de casser les rythmes.
Dans sa liste de courses du week-end, c’était, lors du coup de fil avec Michel Barnier : OU la réinndexation des retraites OU le non déremboursement des médicaments. Aujourd’hui, elle réclame les deux. Et attend la gauche pour censurer. Il n’y a plus de diplomatie possible quand votre adversaire a déjà déclaré la guerre.
Un trimestre pour rien ! On rouvre une cathédrale, reconstruite en 5 ans. Mais la politique s’écroule, en un temps record. Six mois après la dissolution ? Des chapelles et beaucoup de ruines.
