Nous avons rencontré un de ces anciens prisonniers, 48 heures après sa libération de Saidnaya, alors qu’il est hospitalisé près de Damas, à l’hôpital Ibn al-Nafis. Allongé sur un brancard, Khaled souffre le martyre : visage gonflé, œil tuméfié, arcade ouverte, ce conscrit de l’armée syrienne avait déserté avant d’être retrouvé par les sbires du régime al-Assad.
“Ça s’est passé à 5h du matin, j’allais chercher ma voiture”, raconte-t-il. “Ce qu’on m’a fait, comment je suis arrivé là, je ne me souviens pas”, lâche l’homme qui peut à peine bouger. Il a des fractures à la colonne vertébrale, une fracture du crâne. “On veut lui faire des radios”, détaille le médecin qui l’a pris en charge, avant que Khaled ne soit questionné par ceux qui cherchent des proches, en donnant des noms, en montrant des photos. “Je suis blessé, je ne vais pas bien, arrêtez s’il vous plaît”, demande Khaled. “Je ne me souviens de rien.”
“Je n’ai pas trouvé mes deux frères disparus il y a 10 ans”
À l’extérieur de l’hôpital, une cousine est venue d’Alep pour s’occuper de lui. “Ils l’ont sorti de Saidnaya, mais je n’ai pas trouvé mes deux frères de 14 et 17 ans, qui ont disparu il y a 10 ans”, explique-t-elle. Un peu plus loin, un homme passé par la même prison pour un délit mineur résume : “Tu rentres avec les yeux bandés, tu sors les yeux bandés. À l’intérieur, c’est pire que tout ce que tu peux imaginer. Tu pouvais terminer empalé avec ce régime criminel.”
Depuis 2011, on estime que 100 000 personnes sont mortes dans les prisons syriennes, notamment sous la torture. Des dossiers que les justices internationale et française attendent de rouvrir. Les victimes espèrent un jour voir Bachar Al-Assad jugé.
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